
Synthèse critique du Décret n° 2024-968 du 30 octobre 2024 :
Objet : Ce décret viserait à renforcer la pertinence des prescriptions médicales pour le remboursement des produits de santé par l’assurance maladie, tout en luttant contre la fraude et les ordonnances de complaisance.
Publics concernés : Professionnels de santé, organismes d’assurance maladie, et assurés sociaux.
Principaux points :
- Renseignement obligatoire des prescriptions :
Les médecins doivent justifier les prescriptions en fournissant des informations spécifiques sur l’ordonnance ou sur un document dédié, pour garantir le remboursement des produits de santé. - Document spécifique :
Si l’ordonnance ne contient pas toutes les informations requises, un document complémentaire doit être rempli, accessible via téléservice ou envoyé par voie postale. - Lutte contre la fraude et les ordonnances de complaisance :
Le décret vise à limiter les prescriptions abusives, assurant une utilisation plus juste des ressources de l’assurance maladie. - Confidentialité :
Les données médicales restent protégées, accessibles uniquement par le service de contrôle médical de l’assurance maladie. - Concernant les médicaments :
La liste des médicaments concernés n’est pas encore définie et sera précisée ultérieurement. Il est probable que ce contrôle vise principalement des médicaments à risque de mésusage ou à coût élevé.
Exemples de médicaments potentiellement concernés :
- Antibiotiques, antidépresseurs, benzodiazépines, et opioïdes pour leur mésusage.
- Biothérapies, anticancéreux, ou médicaments orphelins pour leur coût élevé.
Critique :
Ce décret peut être perçu comme une forme de “flicage” des patients et des prescripteurs, augmentant les contraintes administratives et risquant de dissuader certains médecins de prescrire des traitements nécessaires. Par ailleurs, les principales dépenses de santé proviennent des mauvaises pratiques en milieu hospitalier:
- Examens, consultations et analyses redondants : Il est courant que des examens (scanners, IRM, bilans sanguins) soient répétés, soit par précaution, soit parce que les données précédentes ne sont pas partagées efficacement entre services. Cela entraîne une surconsommation de ressources, sans réelle valeur ajoutée pour le patient. Bien qu’il soit difficile de quantifier précisément le coût des examens médicaux superflus, des études indiquent que les actes redondants ou inutiles constituent une part non négligeable des dépenses de santé. Par exemple, une analyse suggère que près de 20 % des dépenses de l’Assurance maladie pourraient être attribuées à des soins non pertinents ou évitables.
- Consultations et hospitalisations prolongées : Dans certains cas, les patients restent hospitalisés plus longtemps que nécessaire, parfois par manque de solutions d’hébergement post-hospitalisation ou de soins à domicile adaptés. Cela mobilise des lits, du personnel et des équipements inutilement.
- Mauvaise gestion des stocks de médicaments et de matériel médical : Les hôpitaux peuvent souffrir de gestion inefficace des stocks, ce qui mène à des péremptions de médicaments ou d’équipements coûteux, et donc à un gaspillage important.
- Interventions médicales superflues : Certaines interventions (notamment chirurgicales) sont pratiquées alors qu’elles pourraient être évitées par des traitements non invasifs. Cela est souvent lié à des motivations financières, des précautions excessives, ou un manque d’information sur les alternatives disponibles.
- Utilisation inefficace des technologies coûteuses : Le recours excessif aux technologies avancées pour des diagnostics où elles ne sont pas nécessaires peut alourdir la facture. Parfois, une simple radiographie suffit là où une IRM plus coûteuse est demandée.
- Soins palliatifs ou fin de vie mal coordonnés : Beaucoup d’hôpitaux ont des pratiques qui prolongent la vie de patients en fin de vie sans réels bénéfices pour leur qualité de vie, en multipliant des soins intensifs coûteux qui pourraient être mieux adaptés avec des soins palliatifs.
- Administratif excessif : La gestion administrative est un autre point où les dépenses peuvent exploser. Le temps et les ressources consacrés aux tâches administratives et à la conformité réglementaire peuvent détourner le personnel soignant de ses missions principales et générer des coûts élevés sans impact direct sur les soins aux patients.
- Sous-utilisation des ressources en raison de planifications inefficaces : Des équipements et salles d’opération restent parfois inutilisés durant des plages horaires, faute de coordination. Ce manque de planification entraîne une sous-utilisation de ressources qui coûtent pourtant cher à maintenir.
- Gaspillage alimentaire : Selon une étude de l’ADEME, les établissements de santé en France jettent environ 230 000 tonnes de nourriture par an, ce qui représente un coût estimé à 420 millions d’euros
- Déchets hospitaliers : Les hôpitaux produisent environ 700 000 tonnes de déchets annuellement, soit 3,5 % de la production nationale. Le coût de traitement de ces déchets varie entre 2 et 5 euros par jour et par patient, ce qui, pour un établissement de 500 lits, peut représenter entre 365 000 et 912 500 euros par an.
Conséquences possibles :
Si ce décret se concrétise, il pourrait effectivement réduire les prescriptions non nécessaires. Cependant, il risque également d’accentuer la souffrance de certains patients, en limitant leur accès à des traitements indispensables. Cela pourrait même entraîner l’apparition de nouvelles pathologies, évitables si les patients avaient reçu les soins adéquats en temps voulu.
La probabilité des moyens de contrôle pourrait être envisagée ainsi :
- QR code sur l’ordonnance :
- Probabilité élevée : Le QR code est déjà largement utilisé dans d’autres domaines pour accéder rapidement à des informations sécurisées. Il permettrait aux pharmaciens de vérifier instantanément les prescriptions, ce qui est pratique et sécurisé.
- Accès via un portail informatique :
- Probabilité élevée : L’utilisation de portails en ligne pour le suivi des prescriptions est déjà en place dans de nombreux systèmes de santé. Cela permettrait une gestion centralisée et un accès sécurisé pour les professionnels de santé.
- Formulaire papier :
- Probabilité modérée à faible : Bien que possible, cette méthode est moins pratique et pourrait ralentir le processus de vérification. Elle serait probablement réservée aux situations exceptionnelles où l’accès numérique est impossible.
- Transmission des données à l’assurance maladie :
- Probabilité certaine : La transmission des informations pour un contrôle ultérieur par l’assurance maladie est un élément central du décret, garantissant la surveillance et la conformité des prescriptions.
Les moyens numériques comme le QR code et le portail informatique sont les options les plus probables, car ils offrent une solution rapide et efficace pour contrôler les prescriptions tout en respectant la confidentialité des données.
PDF du JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE